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Iran

Zahra Kazemi aurait été torturée

Portrait de la photojournaliste irano-canadienne Zahra Kazemi.(Photo : AFP)
Portrait de la photojournaliste irano-canadienne Zahra Kazemi.
(Photo : AFP)
La polémique rebondit sur les circonstances de la mort de la journaliste canadienne d'origine iranienne Zahra Kazemi décédée en 2003. Selon le témoignage d’un médecin, la photographe de presse aurait été torturée à mort et violée pendant sa détention. Ces révélations remettent en cause la thèse de l’accident soutenue par la justice iranienne qui avait acquitté le seul suspect de cette affaire, un agent des renseignements.

La journaliste irano-canadienne âgée de 54 ans, Zahra Kazemi, a été arrêtée dans la capitale iranienne le 23 juin 2003, alors qu’elle prenait des photos d’une manifestation devant la prison d’Evine, au nord de Téhéran, où sont détenus de nombreux opposants au régime. Après quatre jours d’interrogatoire, Zahra Kazemi est successivement passée entre les mains des services du parquet, puis de ceux de la police et des renseignements. Au bout de 72 heures de détention, son état de santé s’est dégradé et elle a été admise dans un hôpital où elle a sombré dans le coma. Sa mort cérébrale a été constatée le 27 juin 2003, les médecins l’ayant ensuite maintenue artificiellement en vie jusqu’au 10 juillet. Les autorités judiciaires ont d’abord affirmé que le décès était dû à une attaque, mais une enquête gouvernementale a divulgué qu’elle était morte des suites d’une hémorragie cérébrale entraînée par un coup reçu à la tête.

L'affaire vient d'être relancée avec les déclarations d'un médecin iranien réfugié récemment au Canada. Shahram Aazam a été le premier docteur à examiner, le 27 juin 2003, le corps de Zahra Kazemi après son transport au service des urgences de l’hôpital militaire de Téhéran. Ses conclusions, rapportées par la presse canadienne, sont en totale contradiction avec celles des autorités iraniennes. Selon Shahram Aazam, il est impossible que la journaliste soit morte des suites d’un accident. «L'ensemble de son corps portait d'étranges marques de violence. Tout ce que j'ai vu montrait que c'était de la torture organisée et non pas une blessure qui a causé son décès, faisant état d'ongles arrachés, de doigts cassés, de pieds tuméfiés, d'une jambe lacérée et de signes de viol brutal», a déclaré le docteur Aazam. L’infirmière qui travaillait avec lui et qui, d'après les règles iraniennes, était la seule à pouvoir examiner les parties génitales de Mme Kazemi lui a également indiqué que «le vagin était complètement lacéré et que seul un viol brutal avait pu causer cela».

Porter l’affaire devant une juridiction internationale

Le seul suspect dans cette affaire, un agent du ministère des Renseignements, Mohammad Reza Aghdam Ahmadi, a été acquitté, le 24 juillet, pour «manque de preuves» par un tribunal de Téhéran. Au cours du procès qui avait repris mi-juillet après neuf mois d’interruption, certains droits de la défense n’ont pas été respectés. En effet, le juge a refusé d’entendre les témoignages présentés par la famille Kazemi et l’accès des audiences aux représentants d’organisations de défense des libertés et à des diplomates occidentaux. Le collectif d’avocats de la famille Kazemi, mené par le prix Nobel de la paix Shirin Ebadi, a fait appel pour obtenir une nouvelle enquête. L’avocate Shirin Ebadi espère que cette affaire pourra se régler en Iran par un procès équitable, faute de quoi «elle menace de porter l’affaire devant une juridiction internationale».

De son côté, le gouvernement canadien a également exprimé son mécontentement, quant au déroulement du procès. Ottawa qui, par deux fois, a rappelé son ambassadeur, a poussé pour faire adopter des résolutions aux Nations unies dénonçant la dégradation des droits de l'homme en Iran. Ces déclarations «confirment ce que nous savions depuis longtemps, qu'elle a été victime d'un meurtre et non pas d'un accident», a souligné le ministre canadien des Affaires étrangères, Pierre Pettigrew, à Ottawa. Il a, par ailleurs, révélé que son ministère était au courant depuis quelques mois des révélations du docteur Aazam, des fonctionnaires canadiens l’ayant rencontré en Suède, lorsqu’il a demandé son statut de réfugié au Canada. Selon Pierre Pettigrew, Ottawa entend poursuivre ses pressions jusqu'à ce que justice soit faite, en n'excluant aucune option. Le gouvernement canadien aux côtés du fils de la victime, Stéphane Hachémi, demande également le rapatriement de la dépouille de la photographe qui vivait au Canada depuis près de dix ans.


par Myriam  Berber

Article publié le 01/04/2005 Dernière mise à jour le 01/04/2005 à 17:03 TU